Malgré un tournant, une occasion manquée de mettre fin à de multiples violations des droits humains dans le cadre des activités économiques?

Après trois reports, le 23 février, la Commission européenne a publié sa proposition de directive sur le devoir de vigilance en matière de durabilité. Si le texte constitue un tournant dans la lutte contre les violations des droits humains dans le cadre des activités économiques, il est truffé de failles et d’exemptions telles que le nombre restreint d’entreprises concernées par le devoir de vigilance, ainsi que la portée de l’obligation qui ne couvre pas réellement toute la chaîne de valeur. Au niveau national, la directive s’appliquerait à moins de 0,4% des entreprises au Luxembourg1. Le gouvernement doit aller au-delà de la proposition car si les dispositions actuelles entrent un jour en vigueur au niveau national, le secteur économique le plus important du pays, le secteur financier, sera concerné de manière très limitée alors qu’il s’agit d’un secteur à risque en matière de droits humains.

Exemption d’un devoir de vigilance pour les PME à risque


Le projet obligerait les entreprises de l’UE comptant plus de 500 employés ou réalisant un chiffre d’affaires de 150 millions d’euros à prévenir les violations des droits humains et de l’environnement dans leur chaîne de valeur, en faisant preuve de « diligence raisonnable ». Dans les secteurs où le risque de violations est nettement plus élevé, comme l’agriculture, le textile, l’extraction de ressources, seules les grandes entreprises de plus de 250 employés ou réalisant un chiffre d’affaires de 40 millions d’euros seraient concernées, tandis que les PME actives dans ces secteurs en seraient exemptées. Cette limitation signifie que le projet de législation s’appliquerait à moins de 0,4% des entreprises au Luxembourg. En restreignant le champ d’application de manière aussi spectaculaire, la proposition ignore de nombreuses opérations commerciales nocives, car la taille du personnel et le chiffre d’affaires annuel ne constituent pas des indicateurs fiables de l’impact d’une entreprise sur la vie des travailleurs et des communautés du monde entier.

Le sort des Soparfis dans les mains du législateur luxembourgeois

L’application de la directive aux Soparfis2 dépend de l’approche que le gouvernement choisirait pour transposer le texte. Uniquement si le gouvernement décide d’appliquer les critères de nombre d’employés et de chiffre d’affaires au niveau du groupe de sociétés détenues par une Soparfi dans son ensemble, certaines Soparfis pourraient être également concernées par l’obligation de devoir de vigilance. Il faut s’attendre à un lobbying acharné dans ce contexte afin que ceci ne soit pas mis en œuvre.

Mise en oeuvre efficace ?

En vertu de la proposition de directive, les entreprises pourront être tenues pour responsables des préjudices commis dans leur pays ou à l’étranger par leurs filiales, leurs sous-traitants et leurs fournisseurs, et leurs victimes auront la possibilité d’engager des poursuites devant les tribunaux de l’UE. Il s’agit d’une étape importante qui crée un droit de recours pour les personnes affectées par les activités des entreprises. Malheureusement, ceci est contrecarré par des mesures qui n’ont pas été abordées par la proposition de directive : coûts élevés, des délais courts, un accès limité aux preuves, une capacité juridique restreinte et une charge de la preuve disproportionnée.


Toutefois, une dangereuse lacune risque de rendre la loi inefficace pour prévenir les dommages au-delà du premier niveau de la chaîne d’approvisionnement – et d’empêcher les victimes de tenir les entreprises pour responsables. Le texte laisse entendre que les entreprises pourraient remplir leurs obligation et donc être exonérées de leur responsabilité par exemple en obtenant des garanties contractuelles de leurs fournisseurs qu’ils appliquent un code de conduite ou en déléguant le processus de vérification de la diligence raisonnable à des auditeurs externes. Cela permettrait aux entreprises à décharger la responsabilité sur des tiers et transformerait l’obligation en un exercice de « cocher la case ».


« Alors que l’effondrement de Rana Plaza a suscité une dynamique internationale sans précédent en faveur d’un devoir de vigilance contraignant pour les entreprises, le texte proposé par l’UE neuf ans plus tard revient à ne pas faire entrer dans le champ du devoir de vigilance des sous-traitants indirects tels que ceux impliqués dans cette tragédie », déclarent les responsables de l’Initiative.

La proposition de directive comprend d’autres éléments importants, tels que la mise en place de nouvelles autorités de surveillance dans les États membres de l’UE, chargées de donner des ordres et d’imposer des sanctions dissuasives. Ceci constitue une avancée importante qui contribuerait à une mise en œuvre effective d la proposition.

Droits humains, environnement et…changement climatique

Le projet de directive prévoit, entre autres, que les entreprises adoptent un plan de transition climatique conforme à l’objectif de 1,5 degré fixé par l’accord de Paris sur le climat. Toutefois, la proposition ne prévoit pas de conséquences spécifiques en cas de violation de cette obligation climatique, ce qui la rend inefficace.

Dispositions moins ambitieuses pour le secteur financier

Uniquement un nombre très limité d’entreprises du secteur financier devrait être concerné par le devoir de vigilance. Différentes exemptions et limitations font qu’en pratique, la directive s’appliquerait à très peu d’acteurs au Luxembourg même s’il s’agit d’un secteur à risque selon le Plan d’action national sur les entreprises et les droits humains.3


Le seuil élevé au niveau du nombre d’employés aura comme conséquence d’exclure d’office certains acteurs financiers de taille moyenne comme un grand nombre de banques, les « private equity » et les « venture capital » dont les activités comportent des risques élevés en matière de droits humains.

En outre, les acteurs financiers tombant sous l’application de la directive seraient tenus de se conformer à l’obligation de devoir de vigilance uniquement lors de la conclusion d’un contrat et non sur toute la durée de la relation commerciale comme toutes les autres entreprises. Les prêts aux entreprises, en particulier, courent souvent sur plusieurs années et doivent donc être examinés régulièrement. Cette disposition n’est pas conforme aux Principes directeurs des Nations Unies sur le entreprises et les droits humains qui prévoient que la diligence raisonnable soit menée de manière continue.


« Cette limitation peut donner lieu à des situations absurdes. Par exemple, si une banque accorde un prêt à une entreprise minière avant le lancement des activités, la banque sera exemptée de sa responsabilité pour les violations des droits humains engendrées par la suite alors qu’elle contribue à ces violations par le biais du financement. C’est inadmissible. », expliquent les responsables de l’Initiative.

La position du Luxembourg attendue au tournant

Il est difficile de savoir si cette proposition de directive serait réellement adoptée4 et à quoi rassemblerait le texte final. Rappelons dans ce contexte que la législation européenne en vigueur depuis le 1 janvier 2021 sur les minerais de conflits a mis 8 années et que la loi-cadre n’est pas encore adoptée au Luxembourg.


Or, cette proposition de l’UE constitue une feuille de route pour le Luxembourg, qui peut élaborer sur cette base sa propre législation et aller au-delà des critères fixés par la proposition de directive.


« Les grandes lignes sont maintenant claires et il est difficile d’accepter à ce stade l’argumentaire de « level playing field » ou de « cacophonie de législations au sein du marché intérieur ». Chaque Etat est libre d’aller au delà de ce qui est proposé par la Commission et nous invitons le gouvernement de se positionner sans tarder. », concluent les responsables de l’Initiative.


Ainsi, l’Initiative pour un devoir de vigilance invite le gouvernement luxembourgeois à :

• publier sans tarder les conclusions du rapport sur la possibilité de légiférer sur le devoir de vigilance au Luxembourg du Comité interministériel créé par le Conseil du gouvernement ;
• lancer le processus législatif national sur base du texte de la Commission et proposer des mesures ambitieuses qui servent réellement à prévenir les violations des droits humains et les dommages environnementaux ;
• s’engager au niveau européen pour améliorer la proposition de directive et accélérer son adoption ;
• se concerter avec la société civile afin de pouvoir intégrer dans la législation les préoccupations des personnes affectées par les activités économiques.


1 https://ec.europa.eu/eurostat/statistics-explained/index.php?title=Structural_business_statistics_overview

2 La Soparfi, précédemment connue sous le nom de « holding », permet de faire coexister des activités commerciales et des activités financières au sein d’une même structure. Ceci constitue un de ses attraits : elle peut détenir des titres et actions mais également exercer une activité commerciale

3 Voir Plan d’action national sur les Entreprises et droits de l’Homme du Luxembourg 2020-2022

4 Il est à noter que toutes les propositions de la Commission n’aboutissent pas : https://www.europarl.europa.eu/legislativetrain/summary/01-2022


Téléchargez le communiqué en format PDF ici :

In November 2021, the Government of Bangladesh was called in front of the International Labour Organisation to report on the terrible working conditions in the country.

Why? Because 35,000 Bangladeshis die at work every year and 8 million are injured. Sexual violence is rife, millions of workplaces are barely monitored by government labour inspectors, and people are trapped in jobs with poverty wages.

What can you do? Click below to watch our video exposing the government’s lack of action then use the sign-up form to join the campaign and support workers who want a #ABetterBangladesh.

We can’t let what you just saw continue. Working in Bangladesh continues to be a death sentence for many.

On November 5th — one day before the Government of Bangladesh reported to the ILO — 5 more Bangladeshi workers died in a shoe factory fire.

Source : International Trade Union Confederation

To sign up to the campaign or for more information click here

Droits humains et entreprises – Quelle loi pour le Luxembourg ?

Initiative pour un devoir de vigilance, Luxembourg, Janvier 2022

Le Luxembourg a été élu en octobre 2021 pour la première fois par l’Assemblée générale des Nations unies à New York à un siège de membre du Conseil des droits de l’homme. Dans sa première réaction après l’élection le Ministre des Affaires étrangères et européennes a souligné de vouloir renforcer l’appui aux défenseurs des droits humains et la lutte contre l’impunité, et la protection et la promotion des droits des enfants. Cette élection est un honneur pour notre pays mais également une responsabilité à concrétiser pour le mandat 2022-2024.

Si la lutte contre le travail des enfants et la protection des défenseurs des droits humains constituent une priorité pour le gouvernement luxembourgeois, celui-ci pourra maintenant montrer l’exemple sans tarder en adoptant une législation nationale garantissant une protection contre les atteintes aux droits humains dans le cadre des activités économiques.

Un débat animé s’est engagé depuis quelques années sur le défi d’introduire une telle loi au Luxembourg. L’Initiative pour un devoir de vigilance souhaite apporter sa contribution avec le présent document : Quelles sont les exigences centrales et points-clés d’une loi efficace sur un devoir de diligence afin de protéger durablement les droits humains et l’environnement contre des violations lors d’activités économiques des entreprises ?

LES PRINCIPALES EXIGENCES D’UNE LOI SUR LE DEVOIR DE DILIGENCE Une loi efficace sur la diligence raisonnable en matière de droits humains doit répondre à certaines exigences fondamentales afin de prévenir les violations des droits humains et les dommages environnementaux le long des chaînes de valeur, et d’améliorer la sécurité juridique des personnes affectées, des consommateurs et des entreprises :

1. La loi doit couvrir TOUTES LES GRANDES ENTREPRISES DOMICILIÉES AU LUXEMBOURG afin de mettre en œuvre un plan de vigilance. En outre, elle doit s’appliquer aux petites et moyennes entreprises (PME) dont les activités commerciales présentent des risques particuliers en matière de droits humains : ceux qui sont actives dans les régions et secteurs d’activité économique à haut risque. Une intégration au niveau législatif des « sociétés de participations financières », les SOPARFIs doit également être assurée. L’Initiative pour un devoir de vigilance propose une approche multi-critères en ce qui concerne les Soparfis devant mettre en œuvre de manière effective un plan de vigilance : basé sur les critères de consolidation au niveau d’une société mère existants en droit comptable. Les PME qui ne sont pas actives dans les régions et secteurs d’activité économique à haut risque ne devraient pas avoir l’obligation de faire un plan de vigilance.

2. Les entreprises doivent assurer une DILIGENCE RAISONNABLE en matière de droits humains et environnement au niveau de leurs opérations et relations commerciales le long de la chaîne de valeur, conformément aux PRINCIPES DIRECTEURS DES NATIONS UNIES relatifs aux entreprises et aux droits humains et aux Principes directeurs de l’OCDE à l’intention des entreprises multinationales (Principes de l’OCDE). Comme annoncé par l’étude réalisée par Dr Basak Baglayan : « Pour être conforme aux Principes directeurs des Nations Unies, une loi luxembourgeoise sur le devoir de diligence doit couvrir « tous les droits de l’homme internationalement reconnus », y compris les principes des huit conventions fondamentales de l’OIT tels qu’énoncés dans la Déclaration relative aux principes et droits fondamentaux au travail. Une loi devrait tenir compte du fait que les dommages environnementaux s’accompagnent souvent de violations des droits humains. Un exemple typique est lorsque des produits chimiques provenant par exemple d’usines se retrouvent dans les rivières et nuisent ainsi aussi bien aux bases de la vie (pêche, eau potable) qu’à la santé des riverains. En mettant en œuvre les mesures de précaution prévues par une loi, les entreprises doivent s’efforcer de prévenir et de minimiser de tels risques. D’autres risques à prendre en considération découlent des conventions environnementales que le Luxembourg a ratifiées (p.ex. la Convention de Minamata sur le mercure).

3. Les entreprises doivent être légalement tenues de prendre des MESURES RESPONSABLES en fonction de leur taille, du contexte de leurs activités, de leur pouvoir d’influence, de la gravité des menaces de violations des droits humains et de dommages environnementaux, et du nombre de personnes potentiellement affectées. Les entreprises doivent DOCUMENTER les mesures prises pour respecter des obligations de diligence raisonnable et en RENDRE COMPTE régulièrement dans un plan de vigilance. La loi doit donc imposer l’établissement et la mise en œuvre d’un plan de vigilance avec des mesures concrètes (p.ex. des actions adaptées d’atténuation des risques ou de prévention des atteintes graves ; un mécanisme effectif de plainte et de réparation ; un dispositif de suivi des mesures).

4. La loi doit prévoir une responsabilité pour les DOMMAGES ENVERS LES PERSONNES AFFECTÉES par les violations des humains qui résultent du manquement des entreprises au devoir de diligence. La responsabilité civile quant à elle permettra donc de réparer les dommages causés (matériels et moraux) par les violations des droits humains. Le non-respect des obligations de diligence raisonnable (y compris les obligations de documentation et de rapport) doit être lié à des

SANCTIONS telles que des amendes, l’exclusion des procédures de passation de marchés publics et de la promotion du commerce extérieur qui seront prononcées par une autorité de surveillance compétente.

Il sera nécessaire de désigner une autorité administrative compétente qui contrôle l’existence du Plan et l’exactitude de son contenu. L’Initiative pour un devoir de vigilance propose donc la création d’un organisme de contrôle, habilité à agir sur base de plaintes (signalements) de tiers. Il faut donner en effet un levier à disposition des personnes, communautés affectées, syndicats et organisations de la société civile dans ce contexte.

Par le biais du document « UNE LOI NATIONALE POUR UN DEVOIR DE DILIGENCE: QUEL CHAMP D’APPLICATION ? », l’Initiative pour un devoir de vigilance présente ses propositions et montre clairement qu’une loi sur le devoir de diligence au niveau « droits humains et entreprises » est réalisable.

En France, Allemagne, Norvège et Suisse des législations nationales ont été adoptées. Aux Pays-Bas, l’accord de coalition du nouveau gouvernement néerlandais comprend maintenant l’engagement d’introduire une législation sur la diligence raisonnable obligatoire aux Pays- Bas et de plaider en faveur d’une législation européenne à Bruxelles. Le Luxembourg est à la traîne au regard de cette tendance internationale. Il est temps que cela change avec un cadre légal.

Droits humains et entreprises, téléchargez le PDF ici :

Modern slavery under such conditions is the reality for about 40 million people today. Here is what some of them have to endure : “One day a man came. He said he’ll get me a good job as a maid in the city, but he lied. When I got there I found there was no job. They told me I had to work as a prostitute to pay back what I owed. I refused, but they locked me in a room. I worked 10 to 14 hours a day with no days off. I wasn’t allowed to go anywhere and threatened that if I didn’t obey him, I would lose my job.”

En date du 15 janvier 2020, Monsieur Dan Kersch, Ministre du Travail, de
l’Emploi et de l’Économie sociale et solidaire, a été autorisé à déposer
à la Chambre des Députés le projet de loi n°7521, portant approbation
du Protocole P029 de l’Organisation internationale du travail relatif à la
Convention sur le travail forcé, signé à Genève le 11 juin 2014.

À travers cette prise de position, Caritas Luxembourg s’adresse
prioritairement aux décideurs politiques pour leur indiquer quelques
lacunes existantes dans le projet de loi et ainsi leur faire parvenir
quelques suggestions.
Cette action consiste à élaborer, en concertation
avec le gouvernement, une stratégie et une politique de lutte fiables
pour mettre un terme une fois pour toutes aux pratiques abominables
d’esclavage moderne.

Téléchargez la brochure en format PDF ici :

Article – Le Mode

Un documentaire sans stigmatisation ni jugement met en lumière l’emprise sous laquelle agissent les bandes de jeunes Roumains à Paris.

Il y a des affaires, des enquêtes, des problèmes qui collent comme le sparadrap du capitaine Haddock et semblent ne jamais devoir trouver de résolution.

C’est le cas de ces enfants et ados roumains, issus d’une communauté rom sédentarisée de longue date, qui font partie du quotidien des usagers du métro parisien depuis des années. En bandes plus ou moins grandes, dans lesquelles les filles sont souvent plus nombreuses que les garçons, ils arpentent le réseau toute la journée pour dépouiller touristes et têtes en l’air. Leur butin, plusieurs centaines d’euros par jour, impressionne : il témoigne surtout des longues heures passées à guetter le bon client tout en déjouant la présence policière. Car tant qu’ils n’ont pas atteint la somme requise par les adultes qui les exploitent, ils ont interdiction de rentrer chez eux.

Réalisé par Olivier Ballande, Trafic d’enfants fait le point sur ce phénomène sur lequel les autorités françaises, roumaines et les instances européennes achoppent. Malgré son court format, qui peine à couvrir toute la complexité de son sujet (un second volet est en cours de tournage), ce documentaire réussit à expliquer, sans stigmatisation ni jugement, les mécanismes de ce type de criminalité, où les enfants sont à la fois les délinquants et les victimes d’une forme d’esclavagisme. La caméra suit sur une année le travail de fourmi des enquêteurs et des juges, dans les deux pays qui collaborent activement depuis 2017, ainsi que les réunions au niveau européen, au cours desquelles des solutions communes sont élaborées.

Système d’aliénation familiale

La mendicité exportée de Roumanie apparaît au début des années 1990, explique Olivier Peyroux, sociologue et spécialiste de la traite des mineurs en Europe de l’Est, au cours d’un séminaire. Des Roumains handicapés, non roms, sont alors envoyés en France. Viennent ensuite de jeunes garçons, exploités sexuellement, puis les voleurs de parcmètres. Les bandes du métro sont la dernière production d’un système entretenu par un tout petit groupe de personnes – quelques dizaines de familles, toutes issues du même quartier de la ville d’Iasi – qui forment un véritable clan, avec ses codes et sa loi du silence. Plutôt que d’échapper à la pauvreté, il s’agit d’entretenir le train de vie des chanceux restés au pays : alors que les enfants envoyés en France pensent aider leurs parents à survivre, ils subventionnent mariages luxueux, grosses cylindrées, maisons neuves… visibles par tous sur Facebook.

https://www.lemonde.fr/culture/article/2020/07/22/trafic-d-enfants-petits-voleurs-du-metro-veritables-esclaves-modernes_6046878_3246.html

Selon les Nations Unies, un demi-milliard de personnes, soit 8 % de la population mondiale, risquent de tomber dans la pauvreté en raison des retombées économiques de la pandémie de COVID-19. « Avec une chute du revenu par habitant prévue dans plus de 170 pays, les personnes sans protection sociale seront les plus gravement touchées » averti Olivier De Schutter, nouveau Rapporteur spécial des Nations Unies sur l’extrême pauvreté et les droits humains. Cette problématique touche particulièrement les travailleur.euse.s du secteur textile. En raison de leurs bas salaires et de la répression généralisée des droits à la liberté d’association, les travailleur.euse.s de ce secteur vivent déjà dans des situations précaires et les retombées économiques de la pandémie auront de lourdes conséquences. « Les travailleur.euse.s du secteur de l’habillement vivent au jour le jour. Si ils ou elles perdent leur emploi, c’est leur salaire mensuel qui sera perdu et avec lui la possibilité de nourrir leur famille. » affirme Kalpona Akter, présidente de la Fédération des travailleurs de l’industrie textile du Bangladesh.

Les rapports des médias et les informations directes recueillies par le réseau international Clean Clothes Campaign montrent que de nombreuses usines ferment ou risquent de fermer. Ces fermetures sont dues à l’arrêt de l’approvisionnement en matières premières en provenance de Chine, à la réduction des commandes, liée notamment à la fermeture des magasins en particulier en Europe, ainsi qu’aux initiatives prises par les gouvernements pour des raisons de santé publique. Cela touche un certain nombre de pays tels que le Cambodge, le Myanmar (Birmanie), le Sri Lanka, le Bangladesh, l’Indonésie, l’Albanie et les pays d’Amérique centrale. Dans le monde, les commandes actuelles des usines du secteur textile ont baissé de 41 % en moyenne. Au Bangladesh, qui est un pays très dépendant de cette industrie (80 % des recettes d’exportations), cela équivaut à un minimum de 3,1 milliards de dollars de perte , laissant le secteur dans le chaos et les travailleurs, une fois de plus, en supporter le fardeau. Les travailleurs du secteur de l’habillement craignent la menace très réelle de la famine autant qu’ils craignent l’infection. Si quelques usines, où les conditions de surpeuplement sont la norme, rouvrent leurs portes, très peu de mesures ont été mises en place pour protéger les travailleurs du COVID-19. Depuis avril, le refus de certaines marques de payer l’intégralité de leurs commandes et les salaires impayés ont donné lieu à des protestations quotidiennes.

Rien de tout cela n’est nouveau, mais les événements récents dévoilent la profondeur du déséquilibre du pouvoir, et comment, même avec l’état d’urgence sanitaire mondial sans précédent, les bénéfices des actionnaires continuent de prévaloir sur la vie de ceux qui fabriquent nos vêtements. La crise du COVID-19 réduit à néant les moyens de subsistance de millions de personnes dans l’industrie de l’habillement et rend encore plus nécessaire le soutien des luttes pour un salaire vital, une protection sociale, la liberté d’organisation et la sécurité des usines.

Symbole des excès de la mondialisation et de la délocalisation, l’industrie textile a grandi en se focalisant sur la maximisation de ses marges et la rapidité des collections, mettant sous pression les employés des usines tout en ignorant en majeure partie les coûts sociaux et environnementaux. Pour le moment, les initiatives volontaires se tiennent là où les lois font défaut. Il y a peu de mécanismes fiables et efficaces à la disposition des travailleurs, et la seule chose qui les protégera vraiment seront des législations contraignantes avec des répercussions décisives pour les marques qui ne s’y soumettent pas. Personne ne devrait avoir à compter sur des initiatives volontaires pour la protection des droits humains.

Cette pandémie a changé le monde et aucun d’entre nous ne peut prédire avec précision à quoi il ressemblera dans un mois ou dans un an. Espérons que l’un des changements résidera dans une compréhension globale que les pratiques d’exploitation ne devraient pas être le fondement de notre avenir collectif. « L’extrême pauvreté n’est pas due à un revenu insuffisant ou à la faute des individus ou des familles qui la subissent. Elle est le résultat des choix que font les États et qui perpétuent les situations de pauvreté et d’exclusion sociale », fait valoir M. De Schutter.

Originaire des Philippines, Zita Cabais-Obra a travaillé pendant des années comme esclave pour une riche famille française à Paris. Aujourd’hui elle est libre et a créé la page Facebook et l’association ASF ASOSASYON afin d’aider les victimes d’esclavage en France et de leur donner des conseils juridiques. Elle se bat contre l’esclavage moderne Retrouvez l’association de Zita : https://www.facebook.com/asf.asosasyon

https://www.youtube.com/watch?v=opjwKHuVzPc

Jainab Buton a travaillé pendant deux ans au domicile d’un employé de l’Ambassade d’Arabie saoudite à Paris. Pendant 32 mois, elle a dû faire face à des conditions de vie et de travail qui s’apparentent à de l’esclavage. Depuis 2012, elle réclame justice.

« Tout ce que je demande c’est mon propre salaire. Qu’on me donne ce qui m’est dû. Car j’ai travaillé plusieurs années pour eux, comme un animal. Je dormais sur le sol. Et tout ça pour rien… »

The Guardian, article by Kate Hodal

Slavery affects more than 40 million people worldwide – more than at any other time in history.

How many slaves are there today, and who are they?

The word “slavery” conjures up images of shackles and transatlantic ships – depictions that seem relegated firmly to the past. But more people are enslaved today than at any other time in history. Experts have calculated that roughly 13 million people were captured and sold as slaves between the 15th and 19th centuries; today, an estimated 40.3 million people – more than three times the figure during the transatlantic slave trade – are living in some form of modern slavery, according to the latest figures published by the UN’s International Labour Organization (ILO) and the Walk Free Foundation.

Women and girls comprise 71% of all modern slavery victims. Children make up 25% and account for 10 million of all the slaves worldwide.

What are the slaves being forced to do?

A person today is considered enslaved if they are forced to work against their will; are owned or controlled by an exploiter or “employer”; have limited freedom of movement; or are dehumanised, treated as a commodity or bought and sold as property, according to abolitionist group Anti-Slavery International.

Globally, more than half of the 40.3 million victims (24.9 million) are in forced labour, which means they are working against their will and under threat, intimidation or coercion. An additional 15.4 million people are estimated to be living in forced marriages.

Women can fall into a dark spiral of sexual exploitation and forced, unpaid prostitution, unable to escape.
Women can fall into a dark spiral of sexual exploitation and forced, unpaid prostitution, unable to escape. Photograph: NCA

Of the 24.9 million people trapped in forced labour, the majority (16 million) work in the private sector. Slaves clean houses and flats; produce the clothes we wear; pick the fruit and vegetables we eat; trawl the seas for the shrimp on our restaurant plates; dig for the minerals used in our smartphones, makeup and electric cars; and work on construction jobs building infrastructure for the 2022 Qatar World Cup.

Another 4.8 million people working in forced labour are estimated to be sexually exploited, while roughly 4.1 million people are in state-sanctioned forced labour, which includes governmental abuse of military conscription and forced construction or agricultural work. In certain countries such as Mauritania, people are born into “hereditary” slavery if their mother was a slave.

Again, women and girls bear the brunt of these statistics, comprising 99% of all victims in the commercial sex industry, and 58% in other sectors, according to the ILO.

Where is this happening?

Statistically, modern slavery is most prevalent in Africa, followed by Asia and the Pacific, according to the Global Slavery Index, which publishes country-by-country rankings on modern slavery figures and government responses to tackle the issues.

But the ILO and Walk Free warn that these figures are likely skewed due to lack of data from key regions. “We believe that the global estimate of 40.3 million is the most reliable data to date, although we believe it to be a conservative estimate as there were millions of people we couldn’t reach in conflict zones or on the refugee trail and places where we couldn’t be sure of collecting robust data such as the Gulf states, where access and language barriers prevented us from reaching the migrant worker communities,” said Michaëlle de Cock, a senior statistician at the ILO.

More than 70% of the 4.8 million sex exploitation victims are in the Asia and Pacific region. Forced marriage is most prevalent in Africa. But there isn’t a single country that isn’t tainted by slavery: 1.5 million victims are living in developed countries, with an estimated 13,000 enslaved here in the UK.

Why are there so many slaves today?

Slavery is big business. Globally, slavery generates as much as $150bn (£116bn) in profits every year, more than one third of which ($46.9bn) is generated in developed countries, including the EU. Whereas slave traders two centuries ago were forced to contend with costly journeys and high mortality rates, modern exploiters have lower overheads thanks to huge advances in technology and transportation. Modern migration flows also mean that a large supply of vulnerable, exploitable people can be tapped into for global supply chains in the agriculture, beauty, fashion and sex industries.

According to slavery expert Siddharth Kara, modern slave traders now earn up to 30 times more than their 18th and 19th century counterparts would have done. The one-off cost of a slave today is $450, Kara estimates. A forced labourer generates roughly $8,000 in annual profit for their exploiter, while sex traffickers earn an average of $36,000 per victim.

Joe, 10, and Kwame, 12, who were sold by their mother to a fisherman in Ghana
Joe, 10, and Kwame, 12, who were sold by their mother to a fisherman in Ghana. Photograph: Lonnie Schlein/The Guardian

“It turns out that slavery today is more profitable than I could have imagined,” Kara said. “Profits on a per-slave basis can range from a few thousand dollars to a few hundred thousand dollars a year, with total annual slavery profits estimated to be as high as $150bn.”

It’s important to acknowledge that global population rates also affect estimates: the top 10 countries with the highest estimated absolute number of victims are also some of the most populous. Together, these 10 countries – China, Democratic Republic of the Congo, India, Indonesia, Iran, Nigeria, North Korea, Pakistan, the Philippines and Russia – comprise 60% of all the people living in modern slavery, as well as more than half the world’s population, according to the Global Slavery Index.

An increase in violent conflict worldwide over the past 30 years has also inflated the number of people at risk of slavery, according to the United Nations Office on Drugs and Crime (UNODC), with armed groups and terrorists turning to trafficking “to show they have control over the community, or to increase their force, either recruiting child soldiers or giving sex slaves as a reward for their recruitment”.

What’s the difference between slavery and human trafficking?

Human trafficking is just one way of enslaving someone. Whereas centuries ago it was common for a slave trader to simply buy another human being and “own” that person as their property (which does still happen), today the practice is largely more insidious.

Trafficking involves the recruitment, transfer or obtaining of an individual through coercion, abduction, fraud or force to exploit them. That exploitation can range from forced labour to forced marriage or commercial sex work – and the exploiter can be anyone, including strangers, neighbours or family members. Most people are trafficked within their own countries, although they can also be trafficked abroad; most often the individual is trafficked into forced labour.

Victims in the agricultural sector are often eastern European men and women, who were promised a job by traffickers, or they could be individuals on the fringes of society, homeless or destitute.
Victims in the agricultural sector are often eastern European men and women, who were promised a job by traffickers, or they could be individuals on the fringes of society, homeless or destitute. Photograph: NCA

Many times, the victim is led to believe they have been offered a well-paid job in a different city or country, only to find the job does not exist and they are now indebted to their “employer” or trafficker and must pay transportation, lodging and any other “fees” the exploiter demands, thereby forcing the victim into debt bondage.

For example?

Guardian investigations have revealed a slew of abuses from Qatar to Thailand, India to the United States. Qatar was forced to take action after revelations of abusive practices foisted on migrant workers helping build its infrastructure for the 2022 World Cup.

Trafficking on to fishing boats is still widespread, particularly in south-east and east Asia, where men are lured by the promise of jobs in agriculture or construction, then drugged or beaten and wake up at sea.

Exploitation of migrant workers has also been revealed in Malaysia, Cambodia, China, Italy, Vietnam and the UK.

How does someone end up becoming a slave?

There is no definitive answer to this question. Modern slavery affects people of every colour, age and gender – but is more prevalent among vulnerable people. That might be a Cambodian villager looking for a better paid job in a neighbouring country, only to find himself trafficked on to a fishing boat.

In the maritime industry young men, often Filipino or Indian, eastern European or African, are promised a better life, but instead find themselves in a cycle of debt and exploitation
In the maritime industry young men, often Filipino or Indian, eastern European or African, are promised a better life, but instead find themselves in a cycle of debt and exploitation Photograph: NCA

Or a young girl forced to marry at 13 because climate change has flooded her family’s crops and they can no longer afford to keep her at home. Or a homeless person kidnapped from a London soup kitchen and forced to work on a caravan site. Or a migrant whose visa has expired and can be threatened with deportation if she doesn’t do what the trafficker demands.

Slavery is global but flourishes in places where the rule of law is weak and corruption goes unchecked, says Anti-Slavery International.

Will slavery ever end?

Activists such as Kara believe that slavery can be eradicated for good, but that it would take great political will and considerable research.

First, dedicated investigators would need to identify each level in the often murky supply chains of commodities in order to determine where labour abuses are taking place.

Then, independent certification processes would need to be designed for each commodity, so that consumers could make educated choices about the products they are buying and the slavery or labour abuses implicated with those purchases.Advertisement

Finally, Kara says, industries would need to invest in the communities whose low-cost labour is being used to make the products. “Doing so would help mitigate vulnerability to being trafficked and exploited,” Kara said. “Consumers may have to pay slightly more for certain goods, and multinational corporations may have to accept slightly lower profits. But a freer and fairer labour environment would promote greater productivity, potentially offsetting some of those expenses.”

What do I do if I think someone is a victim of modern slavery?

According to Anti-Slavery International, slavery is so common that it is possible you come across victims “on a regular basis”. Key things to look out for are whether the person has freedom of movement; appears scared, withdrawn or shows signs of abuse; has few personal belongings or identifying documents with them; or seems under the control of someone else and scared to talk.

If you think someone may tick these boxes, it is best to contact authorities directly instead of approaching the person, as approaching them could put them in danger. In the UK, you can contact the Modern Slavery Helpline on 08000 121 700, the police, Crimestoppers or groups such as Anti-Slavery International.